Femmes à Polytechnique : 50 ans après, où en est-on ?

1972 : Polytechnique ouvre ses portes aux femmes. 50 ans plus tard, elles restent minoritaires.

Entre symboles forts et réalité plus contrastée, la question de la place des femmes à l’X reste d’actualité.

J’ai assisté à la célébration officielle des 50 ans des femmes à Polytechnique en présence de Mme Elisabeth Borne, alors 1ère ministre.
Voici ce que j’en retiens.

Elisabeth Borne, 1ère ministre et Eric Labaye, directeur de l’Ecole Polytechnique

📉 Une promesse à moitié tenue

Le 15 novembre 2022, l’École Polytechnique a célébré les 50 ans de l’entrée des femmes dans son concours d’admission.
En 1972, elles étaient 7 à intégrer l’école sur 315 candidats, dont Anne Duthilleul-Chopinet, première major.
Depuis, la proportion de femmes reste faible : environ 20 % aujourd’hui en cycle ingénieur.
L’objectif affiché est d’atteindre 30 % d’ici 2026 pour les élèves, et 40 % pour les enseignantes-chercheuses.
Malgré les discours, la féminisation de l’école progresse lentement.

📅 Chronologie marquante

1970 : la loi Debré autorise officiellement l’entrée des femmes à Polytechnique, mise en œuvre en 1972.
1992 : Claudine Hermann devient la première femme professeure à l’X.
1996 : les femmes obtiennent enfin le droit de porter le bicorne, symbole fort de l’école. Jusque-là, elles devaient porter un tricorne.
L’exposition « Célébrer et Inspirer » retraçait ces étapes majeures et mettait à l’honneur les figures emblématiques comme Anne Chopinet, Christel Heydemann ou encore Anne-Marie Lagrange.

🎓 Une soirée engagée et inspirante

Coline et Glorielli, élèves en Terminale spécialité maths

J’ai moi-même été invitée à cette soirée, accompagnée de 2 de mes élèves lycéennes : Coline et Glorielli.
50 lycéennes d’Ile-De-France ont été conviées à l’évènement afin de les sensibiliser au manque de femmes dans les sciences.
C’était une belle opportunité pour leur faire découvrir un lieu emblématique des sciences et entendre des témoignages inspirants.

La spécialité mathématiques, aujourd’hui encore, manque cruellement de filles, et cette sous-représentation se répercute ensuite dans les écoles d’ingénieurs. Pendant la soirée, des problématiques majeures comme la mixité sociale, les biais dans les recrutements ou les difficultés rencontrées par les jeunes femmes dans les filières scientifiques ont bien été abordées. De nombreuses pistes concrètes ont été évoquées : partenariats avec les lycées, actions de mentorat, adaptation des processus de sélection, valorisation des rôles modèles… Une volonté claire de faire évoluer les choses, même si le chemin reste long.

Nous avons assisté d’ailleurs à une table ronde sur le manque de mixité dans les sciences.
Les lycéennes ont aussi pu visionner le portrait de femmes scientifiques aux compétences variées : par exemple Anne-Marie Lagrange (X1982) astrophysicienne, ou Sarah Lamaison (X2012) fondatrice d’une startup qui recycle le CO2 et le transforme en matières premières durables.

La table ronde sur le manque de mixité dans les sciences.

🎤 La parole inspirante d’Élisabeth Borne

Première femme à occuper le poste de Première ministre, et ancienne élève de l’X (promotion 1981), Élisabeth Borne a clôturé la soirée.
Elle a rappelé l’importance de lutter contre les stéréotypes de genre, de croire en ses rêves, et de ne pas se laisser enfermer dans les attentes sociales.
Elle a notamment cité Sophie Germain, mathématicienne du XVIIIe siècle qui étudiait clandestinement à Polytechnique à une époque où l’accès lui était interdit.

🧠 Analyse et critique

L’école a fait des efforts notables de communication, mais cela ne doit pas masquer le manque de mesures structurelles.
Les chiffres sont alarmants : la moitié des filles arrêtent les maths après la seconde !
Les objectifs de féminisation de l’X pour 2026 sont louables, mais ils ne seront atteints que si l’on agit dès l’amont : dans les collèges, les lycées, les prépas.
Des dispositifs de tutorat, de mentorat, des campagnes ciblées dans les établissements défavorisés doivent être mis en place.
La symbolique (uniformes, présence dans les médias) ne suffit pas : il faut des actes forts pour réellement faire évoluer les chiffres.

🔭 Qu’attendre de la suite ?

Il faudra surveiller si les objectifs annoncés sont tenus. Mais aussi, si l’ouverture sociale est au cœur de la stratégie de recrutement.
Des filles brillantes issues de milieux populaires doivent pouvoir intégrer l’X sans avoir à lutter contre des stéréotypes ou des obstacles socio-économiques.
Par ailleurs, l’impact réel des expositions et des événements doit être évalué : inspirer, c’est bien, mais former, accompagner, c’est mieux.

✅ Conclusion

L’événement de novembre 2022 a marqué une étape symbolique forte : 50 ans après l’entrée des femmes à Polytechnique, un hommage leur a été rendu.
Mais malgré la solennité et les discours inspirants, le constat reste en demi-teinte.
La féminisation progresse, mais lentement, et de manière inégale.
Il est temps que l’école passe du symbole à l’action, et que l’égalité ne soit plus un objectif, mais une réalité concrète.

Elisabeth Borne, X1981

Pour finir, je souhaite encourager toutes les lycéennes à faire des sciences, vous n’êtes pas moins bonnes que les garçons et on a aussi besoin de vous !!

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